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 Début d'une nouvelle vie

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Hammjar
Édile Enquiquineuse
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Hammjar
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MessageSujet: Début d'une nouvelle vie   Début d'une nouvelle vie EmptyJeu 22 Oct - 1:06

[HRP : Les chapitres qui vont suivre sont la résultante d'un travail à six mains : Azog, Sombre, et moi-même avons travaillé tous les trois sur ce texte. Les passages de chacun sont mélangés sans aucune distinction, pour apporter une unité au texte. Bonne lecture ! Les commentaires sont les bienvenus.
Je tiens à remercier Azog et Sombre de s'être autant prêtés au jeu, ce fut un véritable régal que de partager ceci avec vous.]









Chapitre 1 ❝ Une requête issue du coeur ❞



l'An 322 du Cycle d'Hedarion - Dans les profondeurs du Rempart - Le laboratoire

Comme à son habitude lorsque la nuit commençait à tomber, Elva prenait la direction du Rempart d'Hedarion. Cela faisait quelques années qu'elle s'y rendait fréquemment, profitant du sentiment de sécurité bien singulier que lui procuraient ces innombrables galeries sombres.
Lorsqu'elle ne faisait pas irruption chez le Prince de l'Ombre pour s'entretenir d'affaires importantes, elle écumait les bars, laissant traîner ses oreilles pour se tenir aux faits. Ce soir cependant, elle décida de rendre visite à son amie Lantis. Elle ne l'avait jamais rencontrée dans ses appartements, mais elle avait connaissance d'un laboratoire où la Sombre Dame menait ses recherches.

Toute vêtue de geais, Elva était plus sombre que jamais. Les derniers conflits avaient mis à mal son regard pétillant et son sourire souvent insolent. Elle frappa à la porte du laboratoire, et entra aussitôt sans attendre la réponse. La petite silhouette de Lantis était penchée sur l'une des paillasses du laboratoire. Elle s'approcha doucement :

Ma Sombre Dame ? J'ai à te parler. C'est un sujet assez... personnel.

Elva jouait avec la dentelle de ses manches, trahissant son appréhension. Prenant une grande inspiration, elle lui exposa sa requête

Tu n'es pas sans savoir le profond amour que j'ai pour mon Azog. Pour lui, je serai capable de faire n'importe quoi. Seulement, voilà : il ne m'en a jamais parlé, mais je le soupçonne d'avoir possédé pendant longtemps l'un de ces précieux artefacts. De ceux qui semblent prolonger la vie éternellement. Ma tante m'en avait parlé, elle en avait possédé un durant des années. Mais le pouvoir conféré par cette magie n'est que temporaire.
La vigueur et la vivacité d'esprit de mon bien-aimé ne sont à nulle autre pareilles. Cependant, le poids des années commence à courber ses délicieuses épaules. J'ai terriblement peur de le perdre. Je n'ose imaginer une vie sans être à ses côtés.

J'aimerai implorer ton aide. Tu es nécromante. Tu sais manipuler les forces vitales, l'âme de chaque être. Est-ce que tu peux quelque chose pour lui ? Je ne sais pas s'il l'accepterait, il déteste la magie. Mais s'il y a un moyen de le garder près de moi, je veux le connaître.

Le laboratoire était en désordre, des monticules de livres étaient ouvert et éparpillés près de la grande cheminée, unique source de chaleur dans ce clapier noir.

Lantis la regarda un temps. Juste quelques secondes pour assimiler sa demande peu commune.
Puis elle passa en revue les étagères du fond, remplies de gemmes noires. Seule trace restante des guerres qui venaient de cesser. Déjà dans son esprit elle calculait, dressant la longue liste de ce qui lui faudrait.

"... Sauge, Thym, Rose des tombes, bougie,  quelques décilitres de sang de gorgone, et sept pierres d'âme de taille moyenne."

Elva était restée dans son silence appréhendant certainement sa réponse.

Cela va me demander un peu de temps pour tout mettre en place. Mais il va de soi que j'en suis hautement capable, et je serais même ravie de faire cela pour toi.

Un soupir fut relâché. Lantis souriait, un geste rare mais tout de même existant.

Il doit en valoir la peine pour que tu viennes t'interposer entre la mort et lui... je t'envie un peu.

Elle s'accouda sur le bord de la paillasse de carrelage rouge brique. Un air las et envieux se peignait sur son visage. Jamais, Lantis n'avait cru possible que des vivants viendraient demander son aide pour garder les vivants... vivants. Ce petit jeu l'amusait presque.

Elva hocha doucement la tête pour confirmer les propos de son amie. Elle lui expliqua comment le Profanateur Azog avait fait irruption dans sa vie et la façon dont il l'avait accueillie parmi les siens. A l'évocation de ces souvenirs, ses yeux s'étaient mis à pétiller et un léger sourire se dessinait sur son visage.

Merci d'accepter. Mais si tu le fais pour lui, fais-le aussi pour moi. Il serait égoïste de ma part de lui faire subir un jour ce que je refuse d'affronter moi-même aujourd'hui.
Accepteras-tu ? Il te faudra sans doute beaucoup moins de gemmes pour une demie-portion comme moi !

Elva rit doucement, avant de se rendre compte que malgré sa petite taille, elle était tout de même légèrement plus grande que la Sombre Dame. Elle toussota et s'empressa de sortir sa pipe pour se donner un peu de contenance.

Restait maintenant à faire accepter l'idée à son mari. La tâche s'annonçait des plus ardues...

Évidement, les vivants vont par paires...

Lantis tira une feuille que son verre de vin avait épargné. elle y griffonna quelques lignes de cette écriture ronde qui lui était propre. Bien qu'elle ne devait doubler les ressources par deux, elle y ajouta quelques petits trucs en plus. Du lys des montagnes, de la cire noire, des épices...

Est-ce que tu te sens capable de sacrifier quelqu'un pour toi ? Je veux dire, il me faut un corps, frais, jeune, fort, pour faire le transfert. Je ne doute pas que ton cher Gorzagh trouve rapidement son substitut. Mais toi ?

Elle laissa Elva digérer son propos. Après tout, elle doutait que la Dame du Consortium sache véritablement toute la procédure du rituel. En fait, souhaitait-elle vraiment le savoir?

Elle lui tendit le papier contenant les divers ingrédients dont elle aurait besoin. Le laboratoire était neuf, et ses stocks d'ingrédients fort bas.

Je ne te demanderais rien. Ce service n'a pas de prix. Par contre les ingrédients eux, je ne les possède pas tous. Disons qu'avec ça nous serons quittes.

Elle piqua la pipe des mains de la Dame et en renifla le contenu avant de grimacer.

Je pourrais éventuellement retoucher deux, trois petites chose...

Elle se mit à glousser ouvertement en voyant la tête de la Dame du Consortium.

Elva lisait attentivement le contenu de la liste. Beaucoup des choses indiquées lui étaient parfaitement inconnues, et elle se demandait bien où elle pourrait se les procurer. Elle rangea soigneusement la liste dans une poche de sa mante.

Tout d'abord, c'est moi qui choisirais le prochain corps d'Azog. Je ne doute pas qu'il y ait beaucoup de Gorzagh prêts à se sacrifier pour leur Chef. Mais il ne faut pas le premier venu, il doit correspondre à certains critères dont l'un est de me plaire.
Ensuite pour ma part... Y a t-il un quelconque problème à ce que je te ramène une esclave ? Pas n'importe laquelle, il va de soi. Peut-être un peu plus grande. Mais je suis parfaitement au courant de ce que je te demande.

Quelles retouches aurais-tu en tête ? Si tu as une critique à faire à propos de mon addiction..."


Non je n'ai rien contre ton addiction.

Lantis chargea Soren de tirer un coffre d'un coin du laboratoire. Elle le chargea des ingrédients qu'elle possédait déjà. Elle ouvrit la vitrine d'un cabinet et tira plusieurs sacoches de cuir qu'elle remplit de gemmes taillées et de très belle qualité. Par habitude elle aurait sélectionné celles de moindre qualité, mais elle tria son stock et en retira les plus belles. Elle pouvait bien faire ça pour Elva.

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MessageSujet: Re: Début d'une nouvelle vie   Début d'une nouvelle vie EmptyJeu 22 Oct - 1:06








Chapitre 2 ❝ Confidence au Camp ❞



Quelque part au Camp de Gorzagh'Xhar

Cela faisait quelques temps qu'une étrange malédiction semblait s'être abattue sur la Tribu Azog. Les enfants, les uns après les autres, avaient été saisis d'une fièvre brutale, les amenant à rejoindre leurs ancêtres. Ne restaient que la cadette, la Cannibale ainsi que son bien-aimé Profanateur.
Celui-ci semblait s'être renfermé sur lui-même terrassé par le chagrin, animé de pulsions meurtrières qui le ramenaient au Camp toujours couvert de plus de sang. Elva tentait de lui apporter son réconfort de mieux qu'elle le pouvait, discrètement. Cela passait par de petites attentions : un mot laissé par-ci, une délicieuse bouteille accompagnée de quelques fruits oubliés sur la table, la chaleur de ses bras, ou encore le respect de son silence.

Mais au plus profond d'elle-même, elle était submergée par une peur terrible. Et si la fièvre emportait celui pour lequel elle ferait n'importe quoi ? Qu’adviendrait-il si Azog venait à disparaître ? Elle n'osait l'imaginer, cette simple pensée faisait cesser son cœur de battre quelques instants.

Alors, rongée par la peur et l'anxiété, plus sombre que jamais, elle était allée trouver son amie Lantis Sombrelinceul. Se confiant à elle, elle était parvenue à obtenir son aide.

Un soir, alors que la nuit était des plus silencieuses, Elva fumait sa pipe, l'air songeur. Elle était assise sur le rebord de leur hutte, ses pieds se balançant dans le vide. Elle appela doucement Azog lorsqu'il arriva et l'invita à s'asseoir à ses côtés. Elle lui prit la main et lui tendit sa pipe, posant sur lui un regard plein de douceur.

Prenant une grande inspiration, elle évoqua l'amour qu'elle lui portait, inaltérable malgré les années passées. Elle lui rappela également des vœux qu'il avait prononcés bien des années auparavant, que jamais elle ne pourrait oublier. Elle marquait quelques pauses, cherchant ses mots à tâtons. L'émotion lui nouait la gorge, mais elle continuait. Elle lui expliqua Ô combien elle refusait de lui survivre. Finalement, elle l'implora, le supplia presque d'accepter qu'elle se mette en travers du chemin de la mort. Pour lui. Pour eux. Pour qu'ils continuent de fouler les terres ensemble jusqu'à ce qu'Hedarion disparaisse et les enveloppe tous deux dans sa noirceur.

Le Profanateur Azog n'avait pas dit le moindre mot, l'écoutant parler sans l'interrompre. Dans le silence pesant de la nuit, Elva scrutait le visage de son mari, essayant de deviner ce qui traversait son esprit. Elle connaissait son respect des traditions, sa haine pour la magie, mais également son amour pour elle. Jusqu'où accepterait-il d'aller ?

Il y a des âmes que la guerre n’effraie. Certains la fuient, d’autres n’y vont qu’à reculons, contraints par l’honneur ou les circonstances. Mais Azog le Profanateur a tout de suite humé son ivresse, lui donnant l’illusion de la force avant de lui dispenser les leçons les plus brutales. On peut gagner une bataille face à la vieillesse qui ronge doucement son âme pour en retarder l’ultime affrontement, mais au final, on ne gagne pas la guerre.

Une lune cornue jetait une pâleur vague dans un ciel démesuré et sur la hutte du seigneur de guerre. Il dormait paisiblement en attendant l’arrivée de sa femme sur l’impressionnante superposition de fourrure qui faisait office de lit conjugal. Ses muscles longs, cette peau brûlée au soleil, ses larges mains, l’entrelacs effrayant de ses tatouages et de ses cicatrices. Ils étaient autant de signes et de traces de sa longue existence.

Ses bras étaient encore fermes et rares sont les jeunes Gorzaghs qui osaient affronter son regard. Il lui arrivait de somnoler quand les festins tirent vers l’aurore et les traits de ses compagnons tombés sont devenus lisses dans ses souvenirs. Il a connu des saisons étranges, des cieux différents, des peuples variés comme les arbres d’une futaie. Au cours de cette longue errance, il a perdu les compagnons de sa jeunesse et même un à un ses propres enfants. La mémoire d’Azog avait fini par s’user au spectacle sans cesse renouvelé du monde.

Une seule chose pouvait encore rendre un second souffle au vieux Gorzagh. L’amour de sa bien-aimée Elva et ses folles idées.

Les premiers rayons du matin peinaient à traverser l'épaisse végétation de la jungle entourant le Camp, et pourtant il régnait une certaine agitation. Le signal de rassemblement avait été sonné un peu plus tôt, et tous les Gorzaghs en état de combattre avaient été appelé. Ils attendaient que leur Chef les rejoignent afin de connaître ses ordres, et furent surpris de voir arriver sa femme, la petite humaine marchande. Ils s'étaient habitués à sa présence et lui témoignaient du respect. Elle était souvent présente lors des festins et démontrait beaucoup d'intérêt pour leurs coutumes. Elle avait pris l'habitude de converser avec eux dans leur langue natale et passait régulièrement leur fournir de nouvelles fourrures avant les batailles. Mais jamais elle ne se mêlaient de celles-ci et le Profanateur Azog avait toujours fait en sorte de l'en tenir éloignée.

La reine des Gorzaghs était accompagnée par une femme encore plus petite qu'elle, qui se tenait légèrement en retrait et observait la scène attentivement. Elva les salua et leur demanda de se mettre en rang. Sans un mot, ils s'exécutèrent, et elle passa devant chacun d'eux en les examinant d'un œil perçant. Elle renvoya les plus jeunes et les plus âgés, ne gardant qu'une poignée de combattants dans la fleur de l'âge. Elle demandait à certains de s'avancer, tournait autour en les jaugeant de haut en bas et en se faisant quelques commentaires à voix basse.
Finalement, elle s'arrêta devant un Gorzagh plus grand que les autres et le fixa quelques instants, les bras croisés sur la poitrine. Ses yeux s'attardèrent sur une foule de détails et l'homme sembla quelque peu mal à l'aise d'être ainsi passé sous ce regard inquisiteur. Malgré sa carrure imposante, les traits de son visage comportaient une certaine finesse et il dégageait un charisme peu commun. Elle s'approcha de lui et détacha l'armure qui recouvrait son torse, appréciant sa musculature ferme et élancée. Elle esquissa un sourire, hocha la tête et lui demanda :

Es-tu un bon combattant ?

La question frisait l'insulte. Le Gorzagh gronda légèrement. Elva ne se laissa pas impressionner pour autant et fit signe à l'un de ses gardes personnels, les meilleurs que son mari lui ait confiés. Celui-ci s'avança et lança une hache au Gorzagh vers lequel tous les regards étaient tournés.

Montre-moi!

Les hommes s'écartèrent, dégageant un cercle dans lequel se livrait l'un des plus beaux duels auquel Elva n'ait jamais assisté. Aucun des deux ne semblait pouvoir prendre le dessus, portant des coups qui se trouvaient toujours arrêtés ou esquivés avec habileté. Au bout de quelques longues minutes de combat intense, son garde réussit à toucher l'autre Gorzagh à l'épaule.

Stop ! cria Elva. Merci à vous deux.

Elle s'approcha à nouveau du Gorzagh qu'elle avait choisi et passa son doigt sur la plaie qu'il avait reçue.

Il va te falloir encore un peu d'entrainement. Cependant, j'ai une dernière question : serais-tu prêt à donner ta vie pour ton Chef ?

Il la scrutait avec intensité, une lueur farouche dans les yeux, un rayon de colère... Elva se demanda si cette fois, elle n'était pas allée trop loin. Elle se redressa de toute sa hauteur, soutint son regard sans ciller, attendant la réponse. Après un long silence, il finit par opiner de la tête et de sa voix grave, lui déclara :


Chaque membre de cette Horde serait prêt à donner sa vie pour son Chef, petite femme."

Alors, suis-moi.

Tournant les talons, elle s'enfonça un peu plus dans le Camp, emprunta quelques passerelles, gagnant de la hauteur grâce aux différentes cordes. Le Gorzagh et Lantis lui avaient emboîté le pas et la suivaient de près. Elle les mena ainsi jusqu'à une hutte à peine plus grande que les autres et leur demanda d'attendre à l'extérieur. Pénétrant par l'entrée, elle trouva le Profanateur Azog à l'intérieur.

Mes excuses pour le grabuge occasionné dans le Camp. Mais j'ai une bonne nouvelle : j'ai trouvé ton futur corps. Il t'attend dehors. S'il te convient et si tu es prêt, nous pourrons procéder au rituel.


Le vieil Azog accueillit la nouvelle avec un sourire amer. Il savait au fond de lui que la fin était proche, et il n’avait aucune garantie sur la réussite du maléfice qui allait se jouer. Mais il avait totalement confiance en sa bien-aimée Elva, et jusqu’au bout il lui ferait confiance. Il partit donc à la rencontre de sa nouvelle enveloppe corporelle et son propriétaire de Gorzagh qui allait se sacrifier pour lui.
Plus que jamais, le poids des années pesait sur les épaules du Profanateur et sa démarche fut étrangement lente. Arrivés sur la place, il lâcha la main de sa femme qu’il serrait avec chaleur et fermeté depuis un moment. Puis, il l’empoigna par la taille et la souleva délicatement du sol pour l’embrasser dans une passion dévorante. Ils avaient l’habitude d’échanger de tels moments, mais cette fois-ci, une subtile insistance dans le baiser et quelque chose d’une infinité tristesse au fond du regard d’Azog évoquaient la fin. Il se détourna alors d’Elva et avança vers le Gorzagh qui était resté planté comme un piquet à quelques pas du couple.

Har ! Je te connais bien, frère d’arme. Tu es un fier Gorzagh et un guerrier plus que prometteur. Ma femme a fait un bon choix.

Le guerrier resta stoïque, et sembla un peu perdu devant la déclaration de son chef. Néanmoins, sa fidélité était sans faille et il ferait tout ce que son chef demanderait de lui. Azog ne lui laissa pas le temps de tergiverser et déjà il annonçait l’inévitable.

Il n’y a qu’une seule façon pour savoir si tu es digne d’un tel sacrifice.

Azog provoqua alors le guerrier dans un duel d’autorité dans les pures traditions Gorzaghs, où le vainqueur prendrait la place du vaincu dans la hiérarchie. Personne n’avait jamais osé lancer un tel défi au Profanateur, et le jeune Gorzagh hésita un instant avant d’affermir sa poigne sur son arme. Il respecta la volonté de son chef. Elva écarquilla les yeux et faillit intervenir, mais Azog lui en dissuada d’un regard. Il s’approcha d’elle et lui glissa quelques mots réconfortants à l’oreille.

 Ne t’en fais pas ma belle. C’est la seule façon pour que tout le peuple Gorzagh suive ce guerrier et accepte ma nouvelle condition. Il va me battre et alors seulement ton plan pourra se concrétiser. Notre amour perdurera alors pour l’éternité.

Le duel commença. L’ancien et le futur roi se faisaient face. Ils s’observaient et se jaugeaient. Azog chercha dans la posture du jeune les traces de ses propres faiblesses passées. Le jeune Gorzagh, quant à lui, scrutait les membres de l’ancien pour déceler les points où le poids de l’âge ne pouvait plus être contrebalancé par l’expérience. Ils tournèrent lentement autour d’un centre absent. Leurs jambes gigantesques martelèrent la terre dure de la place. Leurs grognements roulèrent au-dessus des huttes du Camp de Gorzagh’Xhar en vagues ininterrompues. En dessus d’eux, sur les passerelles de cordes et les étendues de bois solidement arrimées, les habitants arrêtèrent leurs occupations, et les regardèrent, bouche bée.

Bien sûr, ils savaient. Azog le Profanateur, le jeune guerrier Gorzagh et Elva. Tous savaient. Le combat n’était qu’une mascarade. Lentement, la garde d’Azog s’abaissait. Son arme pesait de plus en plus dans sa main. La fin, il le savait, aurait lieu au surplomb des ténèbres. A cet instant qu’il avait si souvent contemplé, où les étoiles et la lune ont déjà disparu, mais où le soleil n’est pas encore prêt à apparaître. Ceux qui savent craignent ce moment d’hésitation, où chacun peut sentir au plus profond de soi que demain n’est en aucun cas un dû. Et cette nuit, il est le sacrifice qui garantira le retour du jour. Alors il tourne, il frappe, il mouline. Il brocarde, même. Des insultes si salaces que des vierges pudibondes en tomberaient enceintes rien qu’en les entendant.

La lame du jeune guerrier Gorzagh frappe. Les ténèbres s’abattent. Des centaines de visages indistincts sur les ponts de corde, au sommet des plateformes de bois et dans l’attroupement qui s’était formé sur la place scrutèrent leur ancien chef tomber à genou. Ils avaient un nouveau chef. Plus que l’acier dans son corps, la douleur de cette défaite nécessaire se faisait lancinante. Un instant, entre le soupir du vieux Azog et la première inspiration du jeune, le monde hésita. Un millier de passés se refermèrent. Un milliard de futurs possibles s’entrouvrirent et le temps lui-même vacilla.
Le corps meurtri du vieil Azog fut allongé dans sa modeste demeure, et bien que sa blessure était mauvaise, il n’allait pas mourir tout de suite. Elva prit alors les choses en main, il n’y avait plus de temps à perdre.

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MessageSujet: Re: Début d'une nouvelle vie   Début d'une nouvelle vie EmptyJeu 22 Oct - 1:07








Chapitre 3 ❝ Une âme de Cristal ❞




Lantis avait regardé la scène depuis une position reculée. Elle avait rabattue sa capuche pour protéger ses yeux de la lumière rasante d'une aube fraiche. Le brouhaha qui l'entourait commençait à la mettre mal à l'aise. Depuis combien de temps n'était-elle pas sortie de la fraîche sécurité de son laboratoire?  
Elle tentait de garder un œil sur le combat qui se déroulait entre le sacrifié et le prochain immortel qu'elle créerait.

Deux hommes aux muscles saillant, à la peau mordorée parcourue de cicatrice et d'entrelacs savamment exécutés. Elle avait pris les Gorzagh pour un peuple sans culture, un ramassis de barbare au pagne de fourrure élimé. Quelle erreur de sa part, elle avait devant elle des guerriers fiers et puissants. Elle ferma les yeux et huma durant un long moment l'odeur de terre chaude et d'huile douce qui émanait des hommes les plus proches. Puis le calme revint. L'éclat de l'acier avait fini de retentir. Et sans qu'elle n'ouvre une paupière, l'odeur sucré et ferreuse du sang lui parvint aux narines. La douce délectation d'une plaie fraîchement ouverte s'insinua dans son esprit, et ses pupilles d'ordinaire rondes et ternes offraient une fente verticale fine et nette dans un éclat de feu. Il était temps. Son amie, Elva, ramena l'homme qu'elle aimait dans ses quartiers. D'un geste, Lantis ordonna à ses servants d'empoigner la malle de bois et de fer noir et de la suivre, emboîtant le pas au couple bigarré.

L'intérieur de la hutte était modeste mais il marqua l'esprit de la nécromante. Des livres, un lit de fourrure propre, une odeur douce de fleur séchée, du chèvrefeuille, du thym, une note de narcisse délicate et une touche de clématite dans l'air.
Lorsqu'elle eut fini d'analyser son environnement elle s'approcha de la couche du Profanateur. Elle tata la peau autour de la plaie d'un geste expert. Le sang commençait son lent processus de coagulation. On lui avait discrètement tiré un tabouret pour qu'elle puisse s’asseoir.

Hmm, ne bougez pas.

Elle tira d'une sacoche en cuir une longue tige de métal argenté qu'elle appliqua sur la plaie, récoltant un peu de ce liquide rubis, si important à la vie. Elle le glissa dans un tube de verre qu'elle ferma hermétiquement avec une cire épaisse, avant de le ranger.

Je vais vous expliquer le processus qui va suivre. Posez vos questions avant que nous ne commencions, je ne pourrais pas stopper le rituel une fois ce dernier lancé, sans risquer de vous tuer... elle regarda Azog puis le jeune Gorzagh,  Tous les deux!

Un hoquet d'inquiétude ponctua sa mise en garde.
Elle extirpa du coffre ses ingrédients qu'elle posa sur l'unique table de la hutte.

Il va falloir vous immobiliser. Ce ne sera pas très agréable, mais je suis sûr que vous endurerez ça comme le brave que vous êtes.!

Lantis amena le jeune corps à un endroit précis de la pièce, puis commença à dessiner un motif circulaire de plus en plus complexe. Lorsqu'elle eut fini, elle dut faire plier la volonté du jeune homme sous la sienne, le rendre docile, lui couper toute sensation avec le monde des vivants. Ce fut plus ardu que ce qu'elle ne pensait, l'esprit combatif du Gorzagh la reprit à plusieurs reprise à rebrousse-poil, l'obligeant à dépenser plus de volonté, à appuyer plus souvent sur le cantique. Il posa un genou au sol, puis le second avant de tomber la face contre terre.

Une perle de sueur roula le long de sa tempe et son pouls d'ordinaire si calme, presque mort battait furieusement sous la peau de son cou.

Bien. Le rituel va se dérouler de cette manière, je vais extraire votre âme Profanateur, et la mettre dans un cristal de manière temporaire. Je vais faire de même avec l'âme du jeune Gorzagh présent. Lorsque vos deux corps seront vidé de toute substance éthérée, je replacerais votre âme et la fixerais à ce nouveau corps.

Elle regarda l'homme qu'elle venait de soumettre.

C'est un superbe spécimen, j'ai presque du regret..

Elle fixa Elva droit dans les yeux avec cette moue souriante. Elva en avait de la chance... Vraiment beaucoup.

Agenouillée près de la tête de son mari, celle-ci ne l'avait pas quitté du regard, lui tenant fermement la main entre les siennes. Elle désirait garder gravé en mémoire chaque trait, chaque détail de ce corps qu'elle avait déjà maintes fois contemplé auparavant. L'éclat impertinent dans ses yeux, la forme de son nez, la moue de ses lèvres, l'épaisseur de sa barbe, l'emplacement de chacune de ses cicatrices, aussi saugrenu soit-il parfois...
Le regard du vieil Azog trahissait sa peur et il saisit Elva jusqu'au plus profond de son être, remuant ses entrailles. Jamais encore, elle ne l'avait vu avoir peur. Même à l'aube des plus grandes batailles qu'il ait menées, il affichait toujours un air calme et serein. Au contraire même, l'approche des combats le rendait souvent d'excellente humeur, et c'était souvent dans ces instants qu'Elva captait la nature-même de son bien-aimé.
D'un geste fébrile, elle tâcha de bourrer puis d'allumer sa bouffarde. Elle dut s'y reprendre à plusieurs fois tant ses mains tremblaient. Lorsque ce fut fait, elle porta la pipe aux lèvres du Profanateur qui inspira une longue bouffée.

Je t'avais promis de te faire goûter à cette toute nouvelle herbe.

Un léger sourire anima son visage alors qu'il fermait les yeux. Il paraissait se détendre un peu. Ses doigts se refermaient, exerçant une douce pression dans les mains d'Elva, comme pour la rassurer. Elle se pencha alors au-dessus de lui pour lui offrir un dernier baiser. Il avait le goût des adieux, suave et intense. Alors elle mordit délicatement ses lèvres, dans cette tendre férocité qui les caractérisait si bien.

A tout de suite, mon Saigneur adoré. lui souffla-t-elle.

La Sombre Dame avait fini de soumettre l'esprit du jeune Gorzagh. Elle observait la scène avec intensité. Son regard pétillait, elle semblait se délecter de chaque instant, à l'aise et parfaitement dans son élément. Elva opina du chef pour lui signifier qu'ils étaient prêts mais resta cramponnée à la main de son époux.

Lantis avait attendu qu'Elva calme la crainte naissante de son époux. Elle s'était approchée doucement d'eux, glissant quelques mots à l'oreille de la Dame du Consortium.

Si tu veux rester près de lui... je peux m'en accommodé pour le rituel.

Les épaules d'Elva semblaient avoir perdue de leur raideur, elle devait être surement rassurée de pouvoir rester proche de son redoutable compagnon.

 Alors commençons...

Elle aida Elva à amener Azog  sur le sol. Lantis dessina un second cercle autour du corps pantelant du chef Gorzagh. Elle les laissa s'installé à leur aise.
Elle tendit un flacon contenant un liquide ambrée et huileux à son amie.

Tu peux le lui appliquer sur les tempes et le torse.

Elle étala dans de petites coupoles de bronze les divers ingrédient réparti dans des sachets de soie. Quand elle eut fini de tout mettre en place elle tata la jugulaire du futur corps et tira les cristaux de leur sacoche de cuir. Elle en plaça un près du sacrifié, un cristal clair marbré d'azurite.
Un nouveau cantique s’éleva dans l'air de la hutte, un chant grave et sourd provenant du fond de la cage thoracique. Le cristal pulsa doucement, tout comme le sacrifié grogna par intermittence. Quelques convulsions  plus tard il lâcha un soupir funèbre.  

Voilà une bonne chose de faite.

Elle toucha de ses longs doigts l'épaule du corps livide.

A nous deux maintenant.

Elle se tourna vers Elva qui tenait la tête d'un Roi doucement endormi.
Lantis plaça les nouveaux cristaux autour du jeune corps, avant de venir avec un nouveau cristal clair près d'Elva.

Tiens le bien, il risque de bouger.

Elle posa le cristal sur sa poitrine avant d’échanger un regard entendu avec son amie.

Si tu veux prier tes Dieux, je ne t'en voudrais pas.

Lantis s'assit en tailleur sur le bord du cercle d'Azog. Elle reprit le même cantique que pour le sacrifié. Azog se débattit un moment avant de laisser son âme quitter son corps.
Un cri déchirant vint perturber le silence qui s'était soudainement à nouveau abattu sur le Camp. A l'extérieur, les personnes présentes se doutaient qu'il était en train de se produire des choses étranges dans la hutte du seigneur de guerre. Pourtant, personne n'osait intervenir, le peuple Gorzagh redoutait la magie. Une nouvelle fois, la complainte pleine de souffrance et de tristesse, saisissante, poignante, se fit entendre.
Lorsque le second cristal devint noir à son tour... un soupir s'échappa instinctivement des lèvres de Lantis. La nécromante avait pratiqué le rituel sur sa propre personne, mais elle avait malgré tout une tension juste à la base de la nuque. Une appréhension, un désir de ne pas se trouver face à un échec. Elle prit avec la plus délicate attention le cristal de la poitrine du Profanateur pour l'amener de l'autre côté de la pièce. Aussitôt, Elva amena fermement le corps sans vie de son compagnon contre son sein. Ce dernier commença à refroidir dangereusement, perdant son teint mordoré pour tourner au gris.

Prie tes Dieux aussi fort que tu le peux Elva !

Cette dernière psalmodiait frénétiquement, les yeux fermés, récitant en boucle quelques mots à l'adresse de Zenayna, Adonysia et même Thempkar. Elle se balançait doucement d'avant en arrière, des larmes déferlant sur ses joues pâles.
D'un geste, Lantis planta le cristal dans une base de cire qui fondit instantanément à son contact. Un vent fort soufflait dehors, apportant le lourd nuage sur la canopée entourant le camp de Gorzagh'Xhar. Elle mit le feu aux diverses herbes présentes dans leur coupole, les fumées enveloppèrent le corps jeune et fort. La flamme passant de l'orange au bleu intense. La peau reprit une teinte plus rosée au fur et à mesure que le rituel avançait.
Dans le chant se mêlaient des psaumes discordant avec la note principale du cantique, offrant à la fois une oraison funèbre et un appel à la vie.
Un souffle balaya la chaleur humide présente, laissant un brouillard opaque s’élever depuis l'orée de la jungle. Un soupir s’éleva du nouveau corps, puis un glapissement de victoire vient lui faire échos.
Lantis palpa le pouls alors que les derniers cristaux finirent à se fissurer sur le pourtour du pentacle de craie. Battement fort et régulier.

Estompe le cercle autour de toi, je ne tiens pas à ce que ton âme se fasse aspirer.

Lantis fit de même avec le cercle près du nouveau corps. Elle renversa les coupes et balaya le reste des fragments présents.

Lorsqu'elle voulut le retourner, il l'attrapa à la gorge. Ses doigts compressaient son œsophage, coupant l'arrivé d'air dans les poumons de la nécromante.
Elle aurait dû apporter des entraves par précaution, elle avait pensé que l'humain, de par sa complexité, ses sentiments et émotions, serait plus enclin à garder son calme lorsque l'âme s'accroche au nouveau vaisseau corporel.
C'était une énorme erreur de sa part.

Elle ne dépassait pas le mètre soixante, et n'avait guère la force de rivaliser avec un combattant si aguerri. Elva encore moins. Aucune dague, aucune poudre, rien à portée de main pour s'aider... Sa vue déclina doucement, de petites taches noires commencèrent à apparaître. La suffocation la faisait sombrer dans l'inconscient.
Elva n'avait pas imaginé ainsi le réveil de la nouvelle enveloppe charnelle de son mari. Elle regardait, bouchée bée, le Gorzagh attraper sa sombre amie par la gorge et la plaquer au sol. Elle ne parvint à réagir que lorsqu'elle vit Lantis chercher à l'aveuglette quelque chose, n'importe quoi, qui aurait pu la libérer de cette terrible étreinte. Alors, sans réfléchir, Elva se jeta par-dessus le corps désormais sans vie du Profanateur et cria un mot dans la langue natale du Gorzagh avant de le percuter de plein fouet. Celui-ci semblait avoir porté toute son attention sur la nécromante et parut surpris de voir surgir une furie brune dans son champ de vision. Lantis roula au sol, suffoquant et toussant, mais bien vivante. Elle se tenait la gorge d'une main et s'éloignait en rampant.

Le jeune Gorzagh se trouvait maintenant allongé au sol, Elva assise à califourchon sur son torse. Elle lui tenait fermement les poignets au-dessus de sa tête. Bien qu'il aurait pu se dégager le plus facilement du monde, l'envoyant valser telle une mouche, il n'en fit rien. Toute trace d'agressivité semblait l'avoir abandonné, tout du moins pour le moment. Le regard plongé dans ses yeux, Elva scrutait les tréfonds de son âme. Elle y retrouva cette lueur fougueuse et impertinente qu'elle connaissait si bien. Un sourire radieux illumina son visage en même temps qu'elle fondait en larmes, s'abandonnant contre lui.

Ça a fonctionné. Tu es vivant !  sanglotait-elle.

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